La ligne retenue est assurément celle du durcissement : sur les régularisations de travailleurs sans-papiers dans les secteurs en tension, mesure emblématique, que les sénateurs ont supprimé pour n’admettre que des régularisations au cas par cas et « à titre exceptionnel », pour les conditions du regroupement familial, l’octroi des allocations familiales et de l’aide au logement (APL), pour la politique de « quotas » migratoires annuels, ou encore le droit du sol. Les sénateurs ont aussi supprimé l’aide médicale d’Etat (AME) pour les sans-papiers.

Sur l’accès au titre de séjour des travailleurs étrangers

Deux articles ont été retirés du projet de loi adopté par l’exécutif : les dispositions des articles 3 et 4 en faveur de l’intégration par le travail des ressortissants étrangers. L’article 3 qui aurait conduit à attribuer le droit à un titre de séjour aux étrangers sans-papier travaillant dans des « métiers en tension » a été remplacé par une nouvelle procédure strictement encadrée. Cette procédure permet au préfet de délivrer discrétionnairement une carte de séjour « salarié » ou « travailleur temporaire », valable un an, à la demande d’un étranger, sous trois conditions : que celui-ci ait exercé un emploi en tension durant au moins 12 mois (consécutifs ou non) au cours des 24 derniers mois, qu’il occupe toujours un tel emploi au moment de sa demande, et qu’il justifie d’une résidence ininterrompue d’au moins 3 années en France.

Sur l’accès aux droits sociaux

La Chambre Haute a tout d’abord remplacé l’aide médicale d’Etat par l’aide médicale d’urgence, dont le champ d’action, plus réduit, couvre le traitement des maladies graves et des douleurs aigües, les soins liés à la grossesse, les vaccins réglementaires et les examens de médecine préventive. Ensuite, le bénéfice des prestations sociales non contributives (allocations familiales, prestation de compensation du handicap, aide personnalisée au logement et droit au logement opposable) est désormais conditionné à cinq années de résidence stable et régulière au lieu de quatre. 

Sur les conditions de naturalisation

Le Sénat prévoit un durcissement des conditions d’accès à la nationalité française. D’une part, en augmentant le temps de résidence exigé de cinq à dix ans avant de pouvoir demander la nationalité française. D’autre part, en accordant le bénéfice du droit du sol pour les enfants nés en France de parents étrangers seulement à partir de 16 ans, s’ils en manifestent la volonté.

Le texte augmente par ailleurs de quatre à cinq ans le temps nécessaire de mariage avec un ressortissant français pour que le conjoint de nationalité étrangère puisse être naturalisé. La déchéance de nationalité est prévue en cas de tentatives d’homicide sur un gendarme, policier, ou personne dépositaire de l’autorité publique.

Sur l’accès au titre de séjour  des ressortissants étrangers

Le projet de loi augmente le délai pour formuler une demande de regroupement familial de 18 à 24 mois, conditionné par des ressources régulières et non plus stables et suffisantes. Avant leur venue, les membres de la famille du demandeur devront également justifier d’un niveau minimal de français.  Il est désormais prévu par le texte le retrait d’un titre de séjour en cas de non-respect des « principes de la République »

Sur la mise en œuvre effective des décisions d’éloignement

Le Sénat prévoit la systématisation de la levée des protections contre l’éloignement dans le cas où la personne étrangère est responsable de violences intrafamiliales. Le projet de loi l’autorise également dans les cas suivants : violences commises sur un ascendant, atteintes aux principes de la République, condamnation pour des faits passibles de trois ou cinq ans de prison, violence sur des élus. En outre, les étrangers ayant développé des liens particuliers avec le France peuvent être expulsés, qu’ils soient mariés avec un français, parent d’un enfant français, ou vivant sur le territoire français depuis au moins 10 ans.

Sur la lutte contre l’immigration irrégulière

Là encore, le Sénat a considérablement durci les dispositions du Gouvernement imposant aux préfets de délivrer une obligation de quitter le territoire français (OQTF) à l’encontre des déboutés du droit d’asile et supprime la protection dont bénéficient actuellement certaines catégories d’étrangers contre les OQTF.

Enfin, des quotas migratoires ont été mis en place, autorisant une personne étrangère à venir en France pour des motifs économiques sur une durée de trois ans. Le délit de séjour irrégulier sera passible d’une amende de 3 750 euros.

Le texte sera examiné à l’Assemblée nationale à partir du 11 décembre 2023.

Le texte voté est accessible sur le site du Sénat.